Play me, I’m yours

2019 | 14’31’’ | Documentaire | VO FR ST EN

Distribution : CBA (Centre de l’Audiovisuel à Bruxelles)

Sélection :

  • Le Mois du Doc (2020)
  • International Leipzig Festival for Documentary and Animated Film (2020)

Teaser

Synopsis

Autour d’un repas bruyant, dans un lit où on partageait un paquet de gâteaux, la discussion pendant que tu te lavais, je préparais à manger et maman venait d’acheter un bouquet de fleurs à mettre sur le piano du salon. Tu n’aurais jamais dû baiser avec lui, elle a si bien fait de coucher avec elle. Je t’appelle demain pour qu’on en discute, je dois téléphoner à ma grand- mère avant. L’amitié, l’amour, la famille, les relations, les interactions, la mort, les femmes, les hommes, la nourriture, ça regroupe, ça divise et c’est poreux.

Note d’intention

Play me I’m yours aborde des relations humaines, des relations familiales, amicales et amoureuses. C’est une tentative de monstration d’un possible, celui de décloisonner les catégories dictées, pour ne plus être obligé.e de s’y cantonner. Laissons-les devenir poreuses. Dans un certain climat et milieu familial, en 2020, des dialogues peuvent s’écrire. J’ai souhaité archiver des moments, quotidiens, anodins, des discussions échangées, guidées par des téléphones portables, toujours allumés. Qu’ils soient filmés ou photographiés, que ce soit un enregistrement sonore ou une note ramassée. Je souhaite aborder des courts moments de vie, souvent propres à une génération tout en les faisant dialoguer entre elles. Archiver le “non spectaculaire”, la discussion qui sera oubliée, un paquet de gâteaux partagé dans un lit, quelqu’un.e qui joue du piano dans le salon pendant qu’on prépare le dîner. Les discussions des femmes de ma famille autour d’un album photos et le questionnement lié au souvenir auquel il renvoie, à leur propre cliché. Ce sont les sororités et les adelphités qui me fascinent. La collectivité m’a toujours passionnée mais c’est mon expérience en internat non-mixte qui m’a poussée à documenter, des années plus tard, les trois femmes avec lesquelles je vivrais. Elles sont devenues les actrices principales de ce court métrage. Je filme au quotidien, sans scénario pré-écrit, mes recherches composent mon travail. J’enregistre des discussions, je filme des moments de groupes, de partage, de dialogues de tous les jours, guidée par des personnages qui sont mon entourage le plus proche. Bribes d’instants filmés, enregistrés discrètement, je récolte aussi leurs objets associés, le bout de papier qui traînait pendant qu’on discutait et qui y sera désormais associé pour toujours. Vivre en colocation amène une multitude d’instants d’intimité, de partage de lit inopiné et d’inconnu.e dans la chambre d’à côté.

Play me I’m yours c’est ne pas vouloir oublier un court laps de temps que l’on n’aurait pas sauvegardé. Je me suis placée comme la secrétaire de nos souvenirs, de vos ex toxiques, de celles et ceux pleuré.e.s, de celles et ceux trompé.e.s et de celles et ceux qu’on a partagé.e.s et comment notre amitié y a résisté. C’est les statuts non définis entre les êtres, ceux qui sont flous, qui mettent certain.e.s mal à l’aise et en réjouissent d’autres. Mes vidéos émergent grâce au papier, aux pages composées de mes récoltes d’images, de polaroïds, d’images imprimées, amassées et collectionnées. Passant de mes propres photos à celles trouvées dans la rue, où les personnages sont des inconnu.e.s. Mes écrits les accompagnent. C’est cette pluridisciplinarité qui compose ma narration, je me balade dans les images à la recherche de celles-ci. Un livre, comme une archive papier, est toujours réalisé en parallèle. Je souhaite fabriquer des archives et utiliser les préexistantes pour faire parler l’histoire par le biais du banal. Notre bibliothèque-photos de téléphone est-elle l’album-photo contemporain ?

Play me, I’m yours est l’une des facettes de mes familles. Mon prochain projet se veut comme un volume 2, abordant des questionnements et des problématiques plus politiques, indissociables de l’intime, pour tenter d’aborder cet écart générationnel qui se creuse autour de la table familiale.

Julia Palmieri Mattison

Biographie

Julia Palmieri Mattison est une artiste queer féministe intersectionnelle. Née en 1994, elle grandit avec sa famille en banlieue parisienne.

C’est en passant d’un pensionnat non mixte à la colocation qu’elle s’imprègne de la collectivité et de la complexité des relations et des vies partagées. Elle intègre l’École de Recherche Graphique (Erg) de Bruxelles en 2015. La construction de sa pratique artistique passe par différents médiums : installation, peinture, écriture, photographie et vidéo. Souvent tous indissociables. Elle met en lumière l’intimité, malmenée par la collectivité et dévoyée par les réseaux sociaux. Articulé sur son histoire personnelle, son travail s’affranchit du récit individuel en s’inscrivant dans des champs plus vastes : famille, société ou époque faisant appel à une mémoire commune. Julia photographie ses proches dans leur quotidien, elle capture les moments d’intimité partagée, au sein de sororité, d’adelphité, pour en saisir l’instant le plus sincère. Accompagnée des archives familiales filmées et offertes par son père, elle commence à mixer photos trouvées et photos retrouvées, circulant des unes aux autres, les reliant par des textes et des enregistrements de conversations volées. C’est en cherchant avec acharnement à extraire ce qui compose un.e individu.e, à questionner les limites imposées des relations amoureuses, amicales et familiales qu’elle réalise son premier court métrage : Play me, I’m yours.